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À l’écoute de la Parole multiplication des pains et doctrine sociale de l’Église

Source : Chemins d’Éternité n° 267 Mars/Avril 2015


En espérant ne pas faire trop d’inégèse (qui consiste à faire entrer dans le texte ce qui ne s’y trouve pas), je pense que l’on peut repérer dans le premier récit de multiplication des pains en saint Marc, les 4 grands principes de la doctrine sociale de l’Église. Relisons ce texte (Mc 6, 31-44).



En débarquant, Jésus vit une grande foule. Il fut saisi de compassion envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les enseigner longuement.


Littéralement, le texte dit de Jésus que : « ses entrailles s’émurent. » Il faut s’étonner avec le psalmiste : « Qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui, le fils d’un homme, que tu en prennes souci ? »1.


Et nous voici en présence du premier principe de la doctrine sociale de l’Église : le principe de la dignité de la personne humaine. Selon ce principe chaque homme dépasse en dignité toute chose et même la totalité des choses.


Le fait que Jésus commence par rassasier la foule de sa parole avant de le faire avec le pain nous oriente vers la raison de la dignité humaine : l’homme est un être matériel, mais il est aussi un être spirituel, ouvert à la transcendance, appelé à être l’interlocuteur de Dieu2.


Déjà l’heure était avancée […] ses disciples disaient : « […] Renvoie-les : qu’ils aillent dans les campagnes et les villages des environs s’acheter de quoi manger. » Il leur répondit : « Donnez-leur vous-mêmes à manger. » Jésus refuse de renvoyer les gens pour qu’ils puissent se ravitailler. Il en appelle à la responsabilité des disciples : « Donnez-leur vous-mêmes à manger. »


On pense à cette question de Caïn, si souvent fustigée par le pape François : « Suis-je le gardien de mon frère ? » « Oui, répond le pape, tu es le gardien de ton frère ! Être une personne humaine signifie être gardiens les uns des autres ! »3.


Nous touchons là le deuxième principe de la doctrine sociale de l’Église : le principe du bien commun. Le pape l’a récemment expliqué ainsi aux parlementaires européens : « On finit par affirmer les droits individuels sans tenir compte que tout être humain est lié à un contexte social dans lequel ses droits et devoirs sont connexes à ceux des autres et au bien commun de la société elle-même.

Par conséquent je considère qu’il est plus que jamais vital d’approfondir aujourd’hui une culture des droits humains qui puisse sagement relier la dimension individuelle, ou mieux, personnelle, à celle de bien commun, de ce "nous-tous" formé d’individus, de familles et de groupes intermédiaires qui s’unissent en communauté sociale.

En effet, si le droit de chacun n’est pas harmonieusement ordonné au bien plus grand, il finit par se concevoir comme sans limites et, par conséquent, devenir source de conflits et de violences. »

Il leur ordonna de les faire tous asseoir par groupes sur l’herbe verte. Ils se disposèrent par carrés de cent et de cinquante. […] Il prononça la bénédiction et rompit les pains ; il les donnait aux disciples pour qu’ils les distribuent à la foule.


Les carrés de cent et de cinquante évoquent l’organisation des fils d’Israël au désert pour former le peuple de Dieu5. La structuration de la communauté sociale au moyen de groupements intermédiaires est régie, selon la doctrine sociale de l’Église, par le principe de subsidiarité.

Il s’énonce ainsi : « De même qu’on ne peut enlever aux particuliers, pour les transférer à la communauté, les attributions dont ils sont capables de s’acquitter de leur seule initiative et par leurs propres moyens, ainsi ce serait commettre une injustice […] que de retirer aux groupements d’ordre inférieur, pour les confier à une collectivité plus vaste et d’un rang plus élevé, les fonctions qu’ils sont en mesure de remplir eux-mêmes. »6.


On peut peut-être en voir un signe dans le fait que Jésus ne dispense pas ses disciples de distribuer eux-mêmes les pains, ni d’ailleurs la foule de fournir au préalable le peu de nourriture dont elle dispose. Le Catéchisme de l’Église catholique fonde, en effet, ainsi le principe de subsidiarité : « Dieu n’a pas voulu retenir pour lui seul l’exercice de tous les pouvoirs. Il remet à chaque créature les fonctions qu’elle est capable d’exercer, selon les capacités de sa nature propre.


Ce mode de gouvernement doit être imité dans la vie sociale. Le comportement de Dieu dans le gouvernement du monde, qui témoigne de si grands égards pour la liberté humaine, devrait inspirer la sagesse de ceux qui gouvernent les communautés humaines. Ils ont à se comporter en ministres de la providence divine. »7


Ils mangèrent tous et ils furent rassasiés.


Le quatrième principe de la doctrine sociale de l’Église est le principe de solidarité. Il est très lié au principe du bien commun mais en souligne les dimensions culturelle et globale : la solidarité « c’est la détermination ferme et persévérante de travailler pour le bien commun, c’est-à-dire pour le bien de tous et de chacun, parce que tous nous sommes vraiment responsables de tous. »8.


Le contraire du principe de solidarité, c’est ce que le pape François appelle la « culture de l’exclusion » ou la « culture du rebut » dans laquelle, par exemple, « il n’y a plus de place pour l’ancien ni pour l’enfant non voulu ; pas de temps pour s’arrêter avec ce pauvre dans la rue. »9.


Le jour où la faim dans le monde n’existera plus, nous aurons certainement fait un grand pas dans la mise en œuvre du principe de solidarité.


Abbé Jacques Vautherin, csm


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